Principales condamnations avant le naufrage de l'Erika
Condamnations avant 1999.
1994 : Le Traquair
Les faits
Le Traquair (Navire gazier, pavillon libérien) est surpris le 16/03/94 dans le rail montant ouest d'Ouessant avec dans son sillage une nappe d'hydrocarbures s'étendant sur 8 milles et 10 à 15 mètres de large.
Les motifs et modes de preuve retenus
Le procès verbal mentionne une nappe irisée avec des tâches brunâtres morcelées et la fin du rejet à l'arrivée de l'avion. Des photographies sont prises et retenues comme preuves.
La décision
Le commandant anglais est condamné à 30 000 F d'amende par le TGI de Brest le 27/01/95 cette peine sera portée à 250 000 F par la cour d'appel de Rennes le 18/03/96 ; le paiement de l'amende a été effectué.
1994 : L'Alpha America
Les faits
L'Alpha America (Pétrolier, pavillon des Bahamas)est contrôlé le 15/07/94 au large des côtes du Morbihan en train de rejeter des hydrocarbures sur 20 milles et 100 m de large.
Les motifs et modes de preuve retenus
Les très bonnes conditions météo permettent des photographies montrant l'arrêt puis la reprise du rejet. Le capitaine ne répond pas aux contacts radio.
Le jugement
Le capitaine finlandais est condamné à payer 250 000 F d'amende le 10/11/99, la cour d'appel de Paris annule le jugement le 12/05/00 pour un défaut de procédure.
1995 : Le Salamina
Les faits
Le Salamina (Navire citerne, pavillon grec) est contrôlé le 20/09/95 au large d'Ouessant avec dans son sillage une nappe d'hydrocarbures longue de 20 milles sur 100 mètres de large.
Les motifs et modes de preuve retenus
Le procès verbal signale une nappe continue et un rejet cessant après le contact radio. Quatre photographies sont prises.
Le jugement
Le capitaine grec est condamné à 300 000 F d'amende.
1995 : Le Cardiguan Bay
Les faits
Le Cardiguan Bay (Porte conteneur, pavillon britannique) est repéré le 11/09/95 au large d'Ouessant rejetant des hydrocarbures par l'arrière avec dans son sillage une nappe longue de 15 milles sur 150 mètres de large.
Les motifs et modes de preuve retenus
Le procès verbal signale un rejet cessant après le contact radio et la prise de photos de qualité suffisante pour démontrer la couleur de la mer et l'absence d'autres navires.
Le jugement
Le capitaine anglais est condamné à 200 000 F d'amende.
1995 : L'Helipolis Wind
Les faits
L'Helipolis Wind (Cargo, pavillon égyptien) est surpris le 13/12/95 au large de la Bretagne rejetant dans son sillage des hydrocarbures constituant une nappe longue de 6 milles sur 30 à 50 mètres de large.
Les motifs et modes de preuve retenus
Le procès verbal signale un rejet cessant après le contact radio. Une visite dans le port de Rotterdam permet de relever de nombreuses déficiences sur le bateau. Les photos montrent la provenance et la nature du liquide.
Le jugement
Le capitaine égyptien est condamné à 500 000 F d'amende le 9/12/98.
1998 : Le Lista K
Les faits
Le Lista K (Navire citerne, pavillon chypriote) est identifié le 6/02/98 au large de l'île de Sein avec dans son sillage une nappe longue de 6 milles sur 20 à 30 mètres de large.
Les motifs et modes de preuve retenus
Le procès verbal signale une concordance entre les positions radar du navire et de la nappe, et l'arrêt du rejet au moment du survol. Des photos corroborent les constatations de l'avion des douanes.
Le jugement
Le capitaine grec est condamné à 150 000 F d'amende le 16/06/99 par le TGI de Paris.
1998 : Le Birling
Les faits
Le Birling (Vraquier, pavillon britannique) aurait été repéré le 2/03/98 rejetant des hydrocarbures avec dans son sillage une nappe longue de 3 milles sur 100 mètres de large.
Les motifs et modes de preuve retenus
Le procès verbal signale une nappe d'aspect argenté, un rejet cessant après le contact radio et la prise de photos couleur.
Le jugement
Le capitaine irlandais est relaxé le 20/10/99 les constatations techniques et les photographies ne permettant pas d'établir avec certitude que son navire était à l'origine de la pollution.
1998 : Le Diane Green
Les faits
Le Diane Green (Cargo, pavillon panaméen) est surpris par l'avion des douanes, le 6 février 1997, rejetant des hydrocarbures dans les eaux territoriales françaises dans le secteur de Guernesey.
Les motifs et modes de preuve retenus
Le procès verbal signale une nappe de 8 milles de long sur 200 mètres de large dans le sillage du navire laissant apparaître des traînées colorées. Une inspection néerlandaise a lieu à bord du navire et révèle que le séparateur eau huile est hors d'usage. Des photos et une thermographie sont réalisées.
Le jugement
Il est basé sur l'observation visuelle corroborée par les photographies et la thermographie jointe au dossier. Le TGI de Paris prononce la condamnation du capitaine russe au paiement d'une amende de 300 000 francs le 16/02/1998.
Commentaires sur les années 1994 à 1999
Depuis 1995 les tribunaux français se sont basés sur la résolution IMO MEPC.61(34) adoptée le 9 juillet 1993 qui définit les limites de visibilité des hydrocarbures visés par l’annexe 1 de MARPOL. Cette résolution établit que tout rejet visible est supérieur aux normes. La loi française sur la répression des déversements illicites prévoit la constatation des faits par des agents habilités qui doivent rapporter les faits par procès verbal en joignant tout élément susceptible de constituer un élément de preuve (art 218.6 du Code de l’environnement).
La jurisprudence s’est constituée à partir de l’affaire du Traquair dans laquelle les juges ont retenu le témoignage des agents habilités corroboré par des photographies. Dès lors, ces deux éléments sont apparus dans tous les jugements comme preuve sans avoir forcément besoin d’apporter d’autres éléments comme des prélèvements d’échantillons. Ce dernier point a été confirmé par l’affaire Pavlov, jugée le 19 juin 2002, au TGI de Paris : « la preuve des faits en droit pénal est rapportée par tous moyens et il n’est nullement prévu par les textes, en particulier la convention MARPOL, que des expertises doivent déterminer, pour asseoir la conviction des juges, la teneur des nappes polluantes ».
Un seul cas fait mention d’une thermographie retenue comme élément de preuve, c’est l’affaire du Diane Green jugée le 16 février 1998 : « en l’espèce la preuve de l’infraction résulte des observations visuelles corroborées par les photographies et la thermographie jointes au dossier ».
Les jugements font par ailleurs mention des conditions de l’observation et retiennent comme éléments complémentaires d’appréciation l’absence d’autres navires à proximité ainsi que l’attitude du capitaine lors du contact radio.