Le financement des opérations de lutte

Le financement des opérations de lutte contre une pollution accidentelle des eaux.

Enjeux

Deux grands types d'enjeux économiques sont liés aux pollutions accidentelles des eaux. Il s'agit d'abord des enjeux économiques directement chiffrables :
- coûts d'intervention : analyses, matériels mis en oeuvre, temps de personnels (publics ou privé) ;
- coûts de dommages causés à des tiers : mortalités piscicoles, interdictions de pêches, de vente de coquillages, ... ;
- coûts liés à des mesures de sauvegarde de l'alimentation en eau potable.

Certains enjeux sont plus difficilement chiffrables. Il s'agit par exemple de préjudices causés suite à des pertes d'image de marque ou des atteintes causées au patrimoine naturel et écologique.

 

Principe pollueur-payeur

Selon le principe pollueur- payeur, les coûts des mesures de prévention et de lutte contre la pollution incombent au pollueur. Quel que soit le milieu aquatique considéré, le principe "pollueur-payeur" s'applique en cas de pollution accidentelle, obligeant alors le pollueur à prendre en charge les coûts induits par la pollution et à indemniser les victimes. Mais l'application de ce principe requiert deux conditions sine qua non :
- que le pollueur soit identifié,
- qu'un lien de causalité direct soit prouvé entre l'accident et chacun des dommages.

A défaut, il appartient à la commune de financer la lutte à l'extérieur de la propriété ou de la concession du pollueur, en prenant sur son budget les moyens communaux mis en en oeuvre et les moyens privés contractés ou réquisitionnés par le maire. Un maire qui use de son droit de faire appel à des moyens des services déconcentrés de l'Etat peut se voir demander par eux une garantie de prise en charge de leurs frais.

Le premier réflexe que doit avoir une commune en cas de pollution est donc de chercher à identifier le pollueur. Lorsque cela est possible, elle aura tout intérêt à négocier à l'amiable avec le pollueur et son assureur la prise en charge financière des opérations de lutte. A défaut, elle devra recourir à une procédure en justice souvent longue et coûteuse pour tenter d'obtenir le remboursement de ses frais et dépenses engagées.

De même, les frais de lutte sur leur terrain ou de protection de leurs biens éventuellement engagés par des entreprises ou des particuliers sont à réclamer directement par eux au pollueur et à ses assureurs. Il en est de même des dépenses engagées en faveur de la faune et de la flore par des associations de protection de la nature.

Outre ces conditions restrictives (pollueur connu, lien de causalité direct), la mise en pratique du principe pollueur-payeur en matière de pollution en eaux intérieures comme sur le littoral se heurte à de nombreuses difficultés, parmi lesquelles on pourra citer :
- l'importance des coûts engendrés ;
- la multiplicité des victimes ;
- la non solvabilité du pollueur ;
 - les clauses particulières des contrats d'assurance.

Pour faire face à ses limites, des fonds d'intervention ou d'indemnisation spécifiques ont été créé et peuvent être mis en oeuvre, sous certaines conditions, pour contribuer à l'indemnisation des victimes.

 

Pollution marine

Fonds Polmar

L'instruction de 4 mars 2002 relative au fonds d'intervention contre les pollutions marines accidentelles a créé le fonds Polmar : il s'agit d'un fond d'intervention, géré par le ministre chargé de l'environnement et destiné à permettre l'engagement et la réalisation de toute mesure de prévention ou de lutte contre les pollutions marines accidentelles dont l'ampleur nécessite le recours à des moyens financiers exceptionnels.
 
Il peut être fait appel au fonds Polmar même si aucun dispositif ORSEC n'est mis en oeuvre. Pour qu'une dépense y soit éligible, il faut que les trois conditions cumulatives ci-dessous soient remplies :
- la nécessité de mettre en oeuvre des moyens importants qui dépassent les capacités d'intervention courantes des services de l'Etat,
- le caractère exceptionnel des dépenses engagées,
- une demande d'intervention émanant du préfet maritime ou du préfet de département.
Les dépenses engagées peuvent concerner des fournitures, services et travaux. Ce sont par exemple les commandes de travaux à des entreprises spécialisées, les frais de location, de réquisition ou d'acquisition de matériels et d'équipements, les dépenses d'heures supplémentaires des personnels civils de l'Etat, des collectivités territoriales, des associations dès lors que ces heures correspondent à une activité exceptionnelle...
En revanche, sont exclues du dispositif tout remboursement de la rémunération principale des personnels permanents des administrations publiques, associations ou collectivités.

Convention CLC 69/92 et fonds FIPOL 71/92

A la suite du naufrage du Torrey Canyon en 1967, l’OMI s’est penchée sur un régime international de responsabilité et d’indemnisation qui verra le jour en 1971 sous forme d’un fonds d’indemnisation, le FIPOL (Fonds international d’indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures), initié dans le cadre de la convention internationale sur la responsabilité civile des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (Civil Liability Convention, CLC) signée en 1969 à Bruxelles.
 
 La CLC, signée dans sa forme actuelle en 1992, organise une responsabilité de plein droit (objective) et canalisée sur la personne de l’armateur, qui a en contrepartie la possibilité de limiter sa responsabilité à hauteur d’un certain montant garanti par son assureur responsabilité civile.

 

 

Dans l’hypothèse où ce montant garanti ne couvrirait pas la totalité des demandes d’indemnisation, des indemnités supplémentaires peuvent être versées par le FIPOL (Convention de 1992 portant création du fonds) à condition que le dommage soit survenu dans un Etat qui est précisément membre du Fonds.
 Un « Fonds complémentaire » a été mis en place pour compléter, le cas échéant, par un troisième niveau d’indemnisation supplémentaire (Protocole 2003 portant création du Fonds complémentaire).

 

 

Ces conventions s'appliquent :
- aux dommages dus à la pollution par les hydrocarbures résultant du déversement d’hydrocarbures persistants provenant de navires citernes (pétrole brut, l’huile diesel lourde, l’huile de graissage),
- sur le territoire, dans la mer territoriale ou la zone économique exclusive d’un Etat partie à la Convention.
Le FIPOL 92 et le Fonds complémentaire sont financés par des contributions prélevées sur certains types d'hydrocarbures transportés par mer. Ces contributions sont acquittées par les entités qui reçoivent ces hydrocarbures à la suite de leur transport par mer. Les règles d'indemnisation sont régies par un comité d'Etat membres, dont la France.
Toute personne concernée par un tel dommage dans un État membre du Fonds de 1992 peut former une demande d'indemnisation auprès du FIPOL. On trouvera des informations sur les types de demandes recevables dans le manuel des demandes d’indemnisation disponible sur le site du FIPOL.

 

Convention Bunker

La « Convention Bunker » a été adoptée le 23 mars 2001 à Londres sous l’égide de l’OMI dans le but de permettre une indemnisation rapide et convenable en cas de pollution par hydrocarbures de soute. Elle s'applique :
- aux dommages causés suite à une fuite ou à un rejet d’hydrocarbures de soute d'un navire,
- sur le territoire, dans la mer territoriale ou la zone économique exclusive d’un Etat partie à la Convention.
Rédigée sur le modèle de la CLC 69, la convention Bunker de 2001 retient le principe de responsabilité effective du propriétaire du navire tout en la limitant. Elle prévoit une obligation d'assurance pour tout navire immatriculé dans un État Partie, ou qui touche ou quitte un port situé sur le territoire d’un État Partie, et dont la jauge brute est supérieure à 1 000 (tjb),
La France a ratifié la convention Bunker en juillet 2010.

 

 

Pollution des eaux intérieures

Selon la circulaire interministérielle du 18 février 1985 relative aux pollutions accidentelles des eaux intérieures (J.O. du 13 avril 1985), le Conseil Général du département peut créer un fonds départemental d'intervention pour une indemnisation rapide des services et/ou entreprises qui auront participé aux opérations de lutte.
A charge ensuite pour le département de se retourner vers les responsables pour obtenir la réparation des frais engagés.
Lorsque la pollution survient sur un cours d'eau ou un lac domanial, il est possible d'obtenir réparation par le système de Contravention de Grande Voirie.
Enfin, le juge peut, à la demande des services préfectoraux, condamner le contrevenant pollueur à la remise en état de site.

 

 

L'assurance du risque environnemental

Les dommages causés par les atteintes à l'environnement ne sont généralement pas couverts par les Contrats Responsabilités Civiles et Dommages, ou leur garantie est assortie de nombreuses limitations et plafonnée. Des contrats spécifiques Responsabilité Civile Atteinte à l’Environnement peuvent être souscrits par l’intermédiaire d’ASSURPOL(1), un GIE (Groupement d’Intérêt Economique) regroupant des sociétés d’assurance et de réassurance les plus représentatives du marché français. Créé avec pour vocation de réassurer spécifiquement les risques d'atteintes à l'environnement, ASSURPOL propose notamment une garantie spécifique "assurance du risque de pollution du littoral" pour les collectivités publiques et les entreprises.

Sources :
(1) Site internet d'ASSURPOL

Dernière modification le 18/10/2013
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