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L'évaluation des dommages environnementaux

Les dommages environnementaux, une fois identifiés et caractérisés,sont évalués selon différentes méthodes par les économoistes de façon à leur donner un prix

Qu’il s’agisse de justifier des demandes d’indemnisation dans une négociation amiable ou pour un recours devant un tribunal, les évaluations économiques des dommages environnementaux sont indispencables à la négociation de préjudices environnementaux : il s'agit là d'exprimer les dommages aux ressources naturelles et aux services environnementaux en termes d'argent, une tâche qui incombe aux économistes. Pour un environnement non exploité, le prix ou la valeur économique sera inévitablement calculé de manière indirecte. Les méthodes pour y arriver sont multiples et dépendent du dommage à estimer, du cadre réglementaire du système d’indemnisation, des acteurs de financements et de leurs objectifs.
 
 Dans une logique de réparation, un dommage environnemental s’évalue d’abord par le coût de l’enlèvement de la pollution, soit le nettoyage, ensuite, vient l’évaluation des pertes économiques liées à l’exploitation de la ressource naturelle. Enfin, la restauration de la biodiversité est estimée.

Dommages par contamination des sites

Les dommages par contamination des sites se traduisent économiquement en pertes d’agréments ou d’aménités liées à la dégradation de la qualité de vie des personnes (résidents et touristes) sur le littoral souillé par la pollution d’une marée noire. Il peut s’agir de l’odeur incommodante, de la vision d’un paysage dégradé ou de l’impossibilité de pratiquer une activité en lien avec le littoral. Ce type de dommage s’évalue par les méthodes de l’évaluation contingente et des coûts de déplacement auxquelles s’ajoute le coût du nettoyage et de restauration des sites dégradés.
 
 La méthode des coûts de déplacement (ou de transport) consiste à exprimer la demande d’usage des individus ajoutée à leurs pertes d’agréments,

c’est à dire calculer l’ensemble des coûts engagés dans leur déplacement vers un site environnemental habituellement fréquenté par les touristes et les résidents. Cette méthode a été suivie dans le cas de la marée noire de l’Erika de 1999, lors de l’évaluation des pertes d’agréments des résidents et de la baisse de fréquentation des plages souillées par les touristes.
 
 La méthode par le coût de remise en état des sites revient à calculer les sommes dépensées pour les opérations de nettoyage jusqu’à une restauration complète et efficace des sites contaminés. Dans l’exemple de la remise en état des sites souillés par le déversement des hydrocarbures de l’Exxon Valdez, une deuxième opération de nettoyage a été nécessaire pour pallier au manque d’efficacité de la première. Pour ce qui est du cas de l’Amoco Cadiz, le coût du nettoyage a été calculé à partir des dépenses comptables et du coût du travail fourni par les agents publics (militaires, pompiers, travaux publics, Ministère de l’environnement) et des bénévoles. Ce dernier coût équivalent aux dépenses engagées pour la marée noire a été estimé par rapport aux dépenses versées en l’absence d’accident. Cette méthode est toujours utilisée pour l’évaluation du coût du nettoyage et n’a pas subit de contestation.

 

Dommages aux ressources naturelles à travers leur application économique (pêche, tourisme)

Les dommages à évaluer dans ce cas correspondent à des pertes économiques pures, c’est à dire des manques à gagner liés soit pour l’activité du tourisme, à la baisse de fréquentation ; soit pour l’activité de la pêche, à la perte de l’exploitation de la ressource naturelle vivante et aux dommages aux biens matériels.
 
 

Une analyse comptable de ces activités permet de mesurer les manques à gagner occasionnés par la pollution en terme comptable.
 
 Pour les activités marines : pêcherie, ostréiculture, saliculture, les modèles économiques d’exploitation de ressources naturelles renouvelable et l’étude économique de la comptabilité des entreprises productrices donnent une évaluation de la valeur des pertes liées à la ressource exploitée. L’analyse de série chronologique de capture peut aussi être intégrée dans l’estimation des pertes de production. D’autre part, pour cette activité, le coût de la destruction des biens productibles tels que les filets de pêche revient à calculer le coût de leur remplacement en déduisant leur usure ; et pour ce qui est des biens durables comme les bateaux de pêche, l’estimation des dommages peut se faire par actualisation des revenus futurs.
 
 Pour le secteur touristique, l’évaluation économique des dommages nécessite une étude de l’offre et de la demande sur une période donnée avec l’intégration des facteurs intervenant dans la baisse des fréquentations en dehors de l’impact des marées noires. D’autres méthodes existent., les pertes des ventes subit par le tourisme breton ont été évaluées à partir d’indicateurs indirects tels que les salaires ou les ventes de farine.

 

Dommages causés à la biodiversité

Les dommages aux fonctions écologiques de la biodiversité sont des pertes écologiques pures : ils affectent un bien hors-marché et des méthodes spécifiques d’évaluation des actifs naturels sont nécessaires pour les quantifier.
 

Le texte de la Position Commune précise dans son article 2 les critères sur lesquelles se base l’évaluation du dommage sur la biodiversité : «l’étendue d’un dommage qui a une incidence négative sur la réalisation ou le maintien d’un état de conservation favorable des habitats et espèces doit être évaluée par rapport à l’état de conservation à l’époque où le dommage a été occasionné, aux services rendus par les agréments qu’ils procurent et à leur capacité de régénération naturelle».

Il convient d’évaluer le retour à l’état initial par des données mesurables telles que le nombre d’individus affectés ; leur rôle dans l'équilibre des espèces, au niveau local, régional ou global ; la capacité de multiplication de l’espèce ; la capacité de l’espèce ou de l’habitat à se régénérer en un temps limité du fait de sa seule dynamique.
 
De nombreuses méthodes existent pour mesurer les pertes écologiques. Par exemple dans le cas de l’Amoco Cadiz, les évaluations des dommages environnementaux ont suivi trois méthodes liées à la biomasse détruite. La première consiste à évaluer le coût de la biomasse détruite par rapport au prix du marché des ressources équivalentes commercialisées. La seconde axée sur la chaîne trophique traduit l’équivalence monétaire de la biomasse endommagée en fonction de la ressource exploitée du niveau inférieur de la chaîne trophique. Enfin, la troisième méthode repose sur le prix d’achat des ressources par les laboratoires.
 

La méthode la plus fréquemment employée pour évaluer les pertes écologiques est la méthode d’évaluation par contingence. Cette méthode repose sur une enquête menée auprès des personnes pour connaître ce qu'ils consentiraient à payer pour rétablir le milieu dans sa situation antérieure, si c'était possible. Il s’agit d’une méthode hypothétique : en l'absence d'engagement réel, les personnes sondées peuvent avoir tendance à surestimer leur consentement à payer. Des recherches approfondies sur sa portée et ses limites ont été réalisées dans après la marée noire de l’Exxon Valdez (Alaska, 1989) et un groupe d’économistes américains a proposé une évaluation des pertes écologiques par l’approche des coûts de restauration du milieu naturel.
 
Ces méthodes aussi intéressantes qu’elles soient, sont encore loin de constituer des pratiques courantes dans des processus d’indemnisation. Ainsi, dans le cas de l’Amoco Cadiz, la demande d’indemnisation du dommage écologique a été abandonnée en cours de procès.

Dernière modification le 15/03/2004
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