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TS Taipei

Nom
TS Taipei
Date de l'accident
10/03/2016
Lieu
Taïwan
Zone du naufrage
400 mètres au large de Shimen
Zone du déversement
Zone littorale
Cause de l'accident
Conditions météo
Produit transporté
Matières dangereuses, fioul de soute, diesel marine et lubrifiants
Quantité transportée
392 conteneurs, 411 m3 de fioul de soute, 42 m3 de diesel marine et 52 m3 de lubrifiants
Nature polluant
Fioul de soute
Quantité déversée
116 m3
Type de navire / structure
Porte-conteneurs
Longueur
167 m
Largeur
25,3 m
Tirant d'eau
10,2 m
Pavillon
Taïwan
Propriétaire
TS Lines Co. Ltd.
Armateur
TS Lines Co. Ltd.

L’accident

Le 10 mars 2016, aux alentours de 10 h, le TS Taipei, un porte-conteneurs de 15 487 tonneaux de jauge brute, tombe en avarie totale de propulsion et d’énergie dans les eaux côtières du nord de
Taïwan. Il a à son bord 505 m3 d'hydrocarbures (411 m3 de fioul, 42 m3 de diesel marine et 52 m3 de lubrifiants) ainsi que 392 conteneurs (149 en pontée et 243 dans les cales) dont 9 renferment des substances dangereuses.
Sous l'influence de la forte mousson d'hiver provenant du nord-est, la zone dans laquelle se trouve le navire est régulièrement balayée par des vagues dont la hauteur peut avoisiner les six mètres et par des vents de force 12. Dans ces conditions météo-océaniques difficiles, le TS Taipei s'échoue à 400 mètres au large des côtes du district de Shimen, par sept mètres de hauteur d'eau. La coque souffre, une brèche apparaît, le navire commence à prendre l'eau et une partie de son fioul de propulsion se déverse en mer.

 

Premières mesures d'urgence

Aux alentours de 13 h, les 21 membres d'équipage sont évacués au moyen de deux hélicoptères envoyés par le Centre national des opérations de sauvetage.
Le lieu de l'accident est situé dans un environnement très sensible comprenant des zones de pêches, des sites touristiques et deux centrales nucléaires. À 15 h, l'Administration de protection de l'environnement de Taïwan (EPA) convoque le Ministère des transports et des communications (MOTC), la garde côtière (CGA), la municipalité de New Taipei et l'armateur du navire à une première réunion de crise au Bureau du district de Shimen à New Taipei.

 

Mesures de protection et de surveillance en mer

L’accident retient toute l'attention des médias, du public et du gouvernement, exerçant une pression sociétale considérable sur le centre d'intervention. L’équipe d’intervention du gouvernement coordonne le déploiement de mesures de protection et de lutte contre la pollution du littoral en attendant que l'équipe d'intervention du propriétaire du navire soit en capacité de mettre en œuvre une réponse adéquate. Des barrages flottants et des boudins absorbants sont mis en place pour protéger le littoral, les ports de pêche et les prises d'eau des centrales nucléaires.
Des hélicoptères sont déployés pour effectuer une observation aérienne du site. Ils permettent également aux experts en sauvetage de l'équipe d'intervention de l'armateur du navire, de monter à bord, afin d'évaluer l'état de la coque. L'inspection révèle une brèche à tribord, rendant impossible le remorquage du navire. Par conséquent, les carburants, lubrifiants et conteneurs de substances dangereuses encore à bord doivent être enlevés le plus rapidement possible avant qu'ils ne polluent le site.
Le centre d'intervention surveille en continu la coque et l’apparition éventuelle de pollution à la surface de l'eau et le long du littoral à l'aide de satellites, de systèmes aériens sans pilote (UAS), de radars de surveillance côtière, de caméras CCTV et autres équipements techniques. Un modèle de dérive des nappes d’hydrocarbures est utilisé afin d'identifier les zones du littoral qui pourraient être touchées par la pollution.

 

Récupération des hydrocarbures restés à bord

Alors que l'équipe d'intervention de l'armateur du navire se prépare à opérer, celle du gouvernement poursuit ses actions de surveillance, d'évaluation, de coordination et d'expertise. Le 16 mars, la mer se calme. Mandatée par l'armateur du navire, l'entreprise Seagreen travaille conjointement avec l'entreprise japonaise Nippon Salvage pour monter à bord du navire et récupérer les hydrocarbures restant en soute. Une brève inspection révèle que la stabilité de la partie arrière est compromise. Il est, par conséquent, plus sûr de commencer à pomper les citernes qui s’y trouvent, puis de progresser vers l’avant. La séquence de pompage commence par le diesel marine et se poursuit avec le fioul et les lubrifiants. Des barrages flottants sont déployés autour de l'épave en cas d’éventuel déversement de polluant.
Le 23 mars, l'équipe de sauvetage doit interrompre les travaux car la mousson d'hiver provenant du nord-est reprend et la mer devient forte. Dans la matinée du 24 mars, soumise à une forte houle et des vents violents, la partie arrière du TS Taipei se brise et présente une gîte de 25 degrés sur tribord. Deux morceaux de panneaux d'écoutille, pesant chacun 30 tonnes, tombent alors dans les cales à marchandises, écrasant plusieurs conteneurs et fissurant deux cuves de fioul qui n'avaient pas encore été vidées. Il s’ensuit de nouvelles fuites d'hydrocarbures, entraînant davantage de pollution au niveau des conteneurs immergés encore à bord et des eaux environnantes.
Le centre d'intervention est contraint de réévaluer son plan de réponse pour mettre en place de nouvelles mesures. Le 27 mars, la mer s'étant calmée, l'équipe d'intervention de l'armateur du navire monte de nouveau à bord du porte-conteneurs. Afin d'éviter de nouveaux déversements, des barrages flottants ont été déployés de part et d'autre de l'endroit où la coque s'est brisée, à tribord de la partie arrière et autour de la partie avant. La récupération des hydrocarbures peut reprendre. Les cuves de fioul fissurées sont remplies d'eau de mer et de marchandises provenant des conteneurs endommagés. Du personnel est réquisitionné pour retirer ces marchandises avant de commencer à pomper le carburant, ce qui complique les opérations.
Une fois le fioul pompé, il faut récupérer le lubrifiant contenu dans un réservoir se trouvant sous la ligne de flottaison, dans la salle des machines partiellement immergée. Mais la pression est trop forte et après avoir extrait 1 m3 d’huile, la conduite de ventilation du réservoir, par laquelle s’effectue le pompage, doit être obturée.
Bilan au 31 mars : 295,1 m3 de fioul, 41,9 m3 de diesel marine et 1 m3 de lubrifiant ont été récupérés. Le problème des 36 m3 de lubrifiant restants dans la salle des machines devra être traité au cours de l'étape d’enlèvement de l'épave.

 

Nettoyage du littoral

La côte du district de Shimen est rocheuse et abrite de petites plages. Dans les jours qui suivent le naufrage du TS Taipei, c’est le lubrifiant provenant de la salle des machines qui se déverse en mer. Le centre d'intervention dépêche l'équipe d'intervention du gouvernement sur place pour qu'elle commence à nettoyer les arrivages de polluant à la côte, en attendant que l'équipe de l'armateur du navire prenne la suite. Lorsque la coque se casse en deux plusieurs jours plus tard, cela génère un important déversement de fioul. Environ deux kilomètres de littoral sont pollués de manière significative. La surface et les anfractuosités des rochers présentent des souillures difficiles à retirer rapidement. D'autres endroits moins touchés comportent des déchets contaminés et des boulettes d'hydrocarbures.
Pour compenser les pertes économiques subies par les riverains et les pêcheurs, ces derniers sont recrutés et formés par l'équipe d'intervention de l'armateur du navire afin de prendre part au nettoyage. Ce dernier se déroule en trois étapes. La première consiste à nettoyer la pollution susceptible d'être remobilisée ou de s'étendre, notamment les arrivages à la côte pouvant être directement retirés, les déchets souillés et les boulettes d'hydrocarbures sur les plages. La deuxième étape correspond au nettoyage des rochers à l'aide de nettoyeurs haute pression, de la surface des galets avec un jet d'eau basse pression et des souillures tenaces avec un jet d'eau haute pression haute température. L'objectif de la troisième étape est de redonner aux plages leur aspect initial en plaçant rochers et galets nettoyés sous la laisse de basse mer afin que l'érosion des marées et la dégradation par les microorganismes puissent retirer les derniers résidus d'hydrocarbures.
Entre le 10 mars et le 11 mai, date de fin du nettoyage du littoral, 11 937 personnes ont été mobilisées. Elles ont collecté 66 402 L d'hydrocarbures et 128 039 kg de déchets souillés.

 

Surveillance et récupération en mer

L'EPA utilise des systèmes aériens sans pilote, des satellites et des radars côtiers pour surveiller la surface de l'océan aux abords du lieu de l'accident et prévenir toute pollution issue de rejets continus. La CGA déploie des navires de patrouille pour inspecter la zone. Ceux-ci participent au suivi et à la lutte, tout comme les bateaux de pêche locaux réquisitionnés par l'équipe de l'armateur du navire à la demande du centre d'intervention. Lorsque des hydrocarbures sont repérés à la surface de l'eau, les moyens mobilisés sont déployés pour procéder à la récupération des polluants au moyen d’absorbants (écheveaux, boudins et feuilles).

 

Récupération des conteneurs et des hydrocarbures résiduels

Le 1er avril, une fois la récupération des hydrocarbures terminée, débute l’enlèvement des conteneurs. La priorité est donnée aux huit contenants de substances dangereuses puis aux conteneurs pleins de marchandises situés en pontée de la partie avant. Sont ensuite retirés ceux qui sont vides et localisés sur le pont arrière, et enfin ceux qui se trouvent dans les cales et n’ont pas été détériorés par l’eau.
L’enlèvement des conteneurs vides du pont arrière se révèle compliqué dans la mesure où cette partie du navire présente une gîte de 25 degrés sur tribord. Il apparaît tout d'abord nécessaire de sécuriser les conteneurs de 40 pieds empilés sur quatre niveaux. Une fois cela terminé, le personnel commence à découper les pièces de saisissage servant à fixer les conteneurs au pont. Cette opération demande une extrême prudence car l'instabilité des boîtes peut provoquer leur chute, mettant en danger les intervenants. Le 7 avril, 198 conteneurs sont retirés sans encombre.
Une fois retirés les conteneurs intacts situés sur le pont et dans la première cale, l'attention se porte sur la cale n°3 qui renferme des hydrocarbures résiduels et une multitude d’objets souillés par de l'eau polluée. Des professionnels sont envoyés au préalable dans la cale pour découper et ôter les ces objets avant de procéder à l'écrémage et au nettoyage manuel. L'espace étant très réduit, ces travaux se révèlent très compliqués. Après avoir collecté la majorité des déchets pollués liquides et solides, un jet d'eau haute pression est utilisé pour éliminer les hydrocarbures résiduels sur les cloisons de la cale et des conteneurs. Ceux-ci sont ensuite récupérés au moyen d’absorbants. L’ensemble de ces opérations prend fin le 5 mai.
En tenant compte de l'étude de terrain et des témoignages des intervenants, des spécialistes, des experts, des populations locales, des médias et du centre d'intervention, le Yuan exécutif entérine le 11 mai l'achèvement des opérations de lutte contre la pollution maritime du TS Taipei. Le Bureau maritime et portuaire du MOTC prend les commandes du centre d'intervention le 12 mai afin de passer à la phase d’enlèvement de l'épave.

 

Enlèvement de l’épave

Pour enlever l'épave le plus rapidement possible et empêcher tout autre impact sur l'environnement, le centre d'intervention convient de retirer l'épave en la renflouant puis en la remorquant pour l'éloigner du site. L'armateur du navire et son P&I club lancent alors un appel d'offres afin de confier cette tâche à une équipe de professionnels. Celui-ci est remporté par la filiale singapourienne de l'entreprise néerlandaise SMIT Salvage et l'APHE. Des moyens nautiques basés à Singapour sont dépêchés sur les lieux de l’accident : une bigue flottante d’une capacité de levage de 1 000 tonnes, une barge semi-submersible pouvant transporter 23 000 tonnes et un remorqueur d'une puissance de 8 500 chevaux-vapeur.
L'équipe d'intervention commence le levage des panneaux d'écoutille le 25 mai. Pour ne pas mettre en péril la stabilité de la coque, les conteneurs immergés encore présents dans les cales sont retirés un par un, afin de permettre à l'eau de s'écouler avant dépotage sur la barge. Des matériaux absorbants sont utilisés lors de l’opération afin d'éviter que des hydrocarbures résiduels ne contaminent les eaux environnantes. Le 10 juin, il ne reste plus aucun conteneur sur l'épave.
Le 11 juin, l'équipe de sauvetage commence le retrait des locaux d'habitation dont le poids est d’environ 650 tonnes. Le but est de stabiliser la partie arrière du navire en réduisant son poids pour faciliter les opérations suivantes. Tous les matériaux inflammables sont préalablement enlevés avant le démantèlement qui débute le 19 juin. Le découpage est réalisé au moyen de chalumeaux et de chaînes. Après de multiples incidents de rupture de chaînes, les locaux d'habitation sont détachés et levés le 22 juin, puis chargés sur la barge semi-submersible le lendemain. Le moteur de l'épave de 450 tonnes est levé le 1er juillet puis chargé sur la barge le lendemain.
Le retrait de la partie arrière de l'épave débute le 2 juillet. Malgré le retrait des locaux d'habitation et du moteur, la poupe pèse encore près de 3 000 tonnes, soit trois fois ce que peut supporter la bigue flottante. La structure étant considérablement endommagée et les fuites presque impossibles à colmater, il faut pomper l'eau en continu. Le 22 juillet, l'équipe parvient, à marée haute, à lever la partie arrière puis à la tracter à l’aide de deux remorqueurs. Au cours de l'opération, la coque se rompt de nouveau et prend l'eau. L’arrière du porte-conteneurs reste coincé sur des rochers et les remorqueurs subissent des ruptures de câbles. Malgré ces difficultés, le remorquage est achevé le 25 juillet et le chargement sur la barge est mené à bien deux jours plus tard. Le 1er août, cette partie de l'épave est transportée au port de Keelung pour être démantelée.
L'attention se porte ensuite sur l’enlèvement de la partie avant qui débute le 2 août. Cette section du navire n'ayant pas été immergée, il ne faut que quelques jours de pompage avant de procéder à son remorquage qui se termine le 7 août au soir. Le lendemain, elle arrive au port de Keelung pour être démantelée. À l'issue de l’enlèvement de l'épave, la récupération des débris au niveau des fonds marins commence. Le 15 août, l'ensemble des opérations liées au naufrage du TS Taipei est officiellement terminé.

Dernière modification le 28/05/2018

Voir aussi

Bulletin d’information du Cedre N°36 : « Le naufrage du TS Taipei à Taïwan »
Lettre technique Mer & littoral, 2015-2016, n°42-43

Liens externes

Vidéo de l'échouement du TS Taipei (commentaires en anglais). Ce documentaire est filmé et produit par le chef du groupe d’intervention d’urgence de l'agence taïwanaise pour la protection de l’environnement (TEPA) et GI Tech.

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