Indemnisation
Des responsabilités multiples
Dès le début de la marée noire, la compagnie BP annonce qu’elle s‘estime responsable de la gestion de la lutte contre la pollution. Elle s’engage à indemniser les victimes « légitimes » de la marée noire. Selon le courtier new-yorkais Sanford Bernstein & Co, la facture du géant britannique pourrait atteindre au moins 8 milliards de dollars.
Par contre, en ce qui concerne l’accident dont a été victime la plateforme Deepwater Horizon, l’attribution des responsabilités risque d’être plus compliquée. En effet, BP n’est actionnaire qu’à 65 % du gisement d’hydrocarbures situé dans le golfe du Mexique. Le reste appartient pour 25 % au groupe canadien Anadarko Petroleum Corp. et pour 10 % à la société japonaise Mitsui & Co. De plus, la plateforme appartient à Transocean, une compagnie de forage suisse basée à Houston (États-Unis). D’autres sociétés parapétrolières pourraient également être impliquées, notamment Cameron International et Hydroil qui ont fourni les obturateurs anti-éruption.
Vers une future hausse des montants d’indemnisation ?
En 2011, aux États-Unis, les dommages économiques générés par un accident sont indemnisés à hauteur de 75 millions de dollars par les compagnies pétrolières. Certains sénateurs, estimant que ce montant n’est pas assez élevé, ont déposé un projet de loi afin de relever le plafond à 10 milliards de dollars.
Par ailleurs, une fois ce plafond atteint, les victimes (entreprises ou particuliers) peuvent se tourner vers un fonds spécial alimenté par une taxe sur le pétrole extrait ou importé des États-Unis. Cependant, le total des paiements ne peut dépasser un milliard de dollars. Les sénateurs proposent donc de relever également ce plafond.
Prélude d’un procès hors norme
Le 29 juillet 2010, un avant-procès se tient dans l’Idaho pour déterminer les conditions du procès à venir. Le 10 août, devant les plaignants et les parties responsables, dont BP et Transocean, la commission judiciaire annonce que les plaintes déposées contre les parties responsables seront rassemblées en une seule plainte collective. Elles seront étudiées par le juge Carl J. Barbier en Louisiane.
Le procès civil débute en février 2013 à la Nouvelle-Orléans, l’objectif durant ce procès est d’établir les causes et responsabilités suite à la pollution pétrolière de la plateforme.
Le 4 septembre 2014, selon le jugement de la cour fédéral de la Nouvelle-Orléans, BP s’est rendu coupable de «grave négligence» et de conduite « imprudente » étant à l’origine de la plus importante pollution pétrolière des États-Unis. La responsabilité de BP, de loin le principal fautif, est partagée par Transocean et Halliburton coupables de conduite « négligente ». Cette décision est la première partie du procès.
De manière à limiter le nombre de plaintes, une fois les dédommagements du GCCF acceptés, les victimes doivent abandonner leur droit de poursuivre BP et les autres parties responsables.
Les montants de l'indemnisation
Le 24 mai 2010, BP s’engage à financer jusqu’à hauteur de 500 millions de dollars un programme de recherche visant à évaluer les conséquences sur l’environnement de la marée noire dans le golfe du Mexique, le Gulf of Mexico Research Initiative (GoMRI) est crée. Site dédié à la diffusion des résultats : www.gulfresearchinitiative.org/ et visant à répondre à des interrogations variées.
Selon la législation américaine, BP est responsable de la pollution et donc de l'indemnisation des victimes, c’est pourquoi la compagnie commence la procédure d’indemnisation dès le mois de mai. Le 25 mai 2010, BP a reçu 22 000 demandes d'indemnisation, collectées dans 36 bureaux installés dans les États du golfe du Mexique, et payé 9 millions de dollars de dédommagements. Le nombre des demandes et les montants des dédommagements versés par BP se sont ensuite envolés : le 7 août, 145 000 demandes ont été déposées et BP a versé plus de 319 millions de dollars de dédommagement. Le 24 août, le nombre de demandes s’élève à 150 000 et 400 millions de dollars de dédommagement ont été réglés par BP. Aucune demande n’a été refusée jusqu’à présent.
Le 16 juin 2010, à la demande de l'administration américaine, BP accepte de créer un fonds d’indemnisation, the Gulf Coast Claims Facility (GCCF), de 20 milliards de dollars qui sera abondé ultérieurement. Ce fonds indépendant, géré par l'avocat Kenneth Feinberg, permettra de régler les dommages et intérêts aux particuliers et aux entreprises, les coûts de restauration des ressources naturelles endommagées ainsi que les coûts d'interventions d'urgence des administrations locales et fédérales. Le 9 août, BP a réalisé un premier versement de 3 milliards. Le 23 août, les plaintes ne sont plus reçues par BP mais par le fonds d’indemnisation.
D'autre part, le 1er octobre 2010, BP annonce avoir dépensé un peu plus de 11,2 milliards de dollars pour réparer les dégâts causés par la marée noire.
Le 17 décembre 2010, le gouvernement américain dépose une plainte à l'encontre de BP et des autres sociétés impliquées dans l'accident, afin que leur responsabilité civile soit établie.
Entre avril et novembre 2010, BP et les autres parties responsables (Transocean, MOEX et Andarko) ont reçu sept factures, d'un montant total de 581 millions de dollars, de la part du gouvernement américain. Elles correspondent au coût des opérations de lutte et BP a réglé la totalité du montant. La huitième facture, s'élevant à 25,4 millions de dollars, a été envoyée le 18 novembre et est en attente de règlement.
Le 26 février 2011, 492 775 demandes d'indemnisation ont été déposées au GCCF qui a déjà traité 169 013 demandes pour un montant d'environ de 3,8 milliards de dollars (en plus des 127 000 demandes réglées par BP pour un montant de 400 millions de dollars avant la prise en charge des demandes par le GCCF). De plus, environ 1,1 milliard de dollars a été versé aux différents États touchés par la marée noire.
En juillet 2015, un accord de principe avec la justice américaine prévoit le versement par BP de 18,7 milliards de dollars pour solder les poursuites intentées par l’État fédéral ainsi que par les 5 États côtiers (Louisiane, Mississipi, Alabama, Texas et Floride) dont le littoral avait été pollué. Cet accord résout la plupart des poursuites en cours. Par ailleurs, un montant supplémentaire de 232 millions de dollars est provisionné par BP de façon à couvrir les dommages aux ressources non encore identifiés au moment de l’accord. C’est l’accord le plus important jamais conclu avec une entreprise dans l’histoire américaine. L’accord qui doit encore être validé par les tribunaux, met fin à un procès qui dure depuis plus de deux ans devant la justice civile. Il s’ajoute à l’amende de 4 milliards de dollars infligée à BP par la justice criminelle en 2013. La facture totale pour BP s’élève désormais à 53,8 milliards de dollars, si l’on compte les opérations de nettoyage des sites pollués prises en charge par la compagnie.
Début 2018, le programme d'indemnisation mis en place après la catastrophe touche maintenant à sa fin, indique BP dans un communiqué. La compagnie annonce avoir réglé suite aux demandes d’indemnisation environ 65 milliards de dollars comprenant les amendes, l’indemnisation aux victimes et les frais induits par les opérations de nettoyage des littoraux pollués. Au total, près de 390 000 demandes ont été déposées.