Les effets
A court terme (jours à semaines), pendant la phase d’extension de la pollution, les effets potentiellement dominants sont l’engluement et la toxicité. Ils peuvent perdurer quelques semaines après l’arrêt d’apport de polluant. Ils concernent plus particulièrement les invertébrés benthiques pas ou peu mobiles des fonds meubles et/ou rocheux : échinodermes, crustacés, bivalves, gastéropodes, polychètes, en particulier. Les espèces sont diversement affectées selon leur sensibilité aux hydrocarbures. En cas de phénomène de toxicité aiguë, des échouements de coquillages ou d’oursins morts peuvent intervenir sur le rivage. Dans la colonne d’eau, le plancton peut être localement et transitoirement affecté. Cette atteinte peut toucher les oeufs et larves des poissons et crustacés, en particulier les œufs de thon, avec des risques d'incidence sur le recrutement de l'année. A moyen et long terme (semaines/mois), l’effet physique du recouvrement et de l’engluement des espèces de l’estran, en entraînant un décollement de coquillages, les patelles en particulier, peut être suivi d’une prolifération d’algues vertes par baisse de la pression de broutage.
Au niveau des peuplements benthiques côtiers, une pollution par hydrocarbures peut entraîner localement la perte des espèces les plus sensibles au profit d’espèces opportunistes, menant potentiellement à une banalisation des peuplements. Ces derniers ne se rétabliraient alors qu’avec le retour graduel des espèces atteintes.
Les risques pour les oiseaux de mer sont modérés, dans la mesure où la saison des migrations est terminée. Concernant les mammifères, les données manquent pour anticiper un impact notable. On relèvera cependant la présence de phoques moines de Méditerranée dans la région de l’île des Palmiers, espèce répertoriée comme menacée. Quatre espèces de tortues, dont la tortue verte, espèce menacée, se reproduisent sur les côtes libanaises : des sites de reproduction sont signalés dans les réserves de Tyr et de l’île des Palmiers. Un risque d’impact existe, lié à la coïncidence entre la souillure des plages et la période d’éclosion des œufs : pondus de mai à août, les œufs éclosent 1 à 2 mois plus tard.
Au plan des activités humaines, la présence de fioul sur les plages et dans les eaux littorales interdit la baignade et les activités de plage. Le risque de souiller les filets et de rapporter des produits mazoutés restreint les activités de pêche côtière. Il faudra que la paix soit rétablie, la vie revenue à la normale et les sites nettoyés pour que ces activités puissent reprendre.
En l’absence d’informations précises sur l’ampleur des échouages et le vieillissement du polluant, il serait hasardeux de se prononcer au-delà de ces considérations générales. La Méditerranée n’est pas en danger. Mais cette pollution est grave. Elle demande plusieurs mois de travail de nettoyage difficile, contraignant et coûteux, une tâche lourde de plus dans un pays martyrisé.