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Amazzone : lutte contre la pollution

Une lutte particulièrement difficile

Au matin du 1er février, la préfecture maritime se mobilise et active le PC intervention du Cedre. Il est très difficile de repérer les hydrocarbures, d’évaluer leur nature et leur volume car la météo extrême complique les reconnaissances aériennes. Il est quasiment impossible de prédire avec certitude l’arrivée sur les côtes de ces nappes répandues en chapelets sur plusieurs centaines de nautiques.

Cependant un hélicoptère de l’aéronavale réussi à prélever sur zone les premiers échantillons de pétrole. L’EPSHOM confirme qu’il s’agit bien d’un pétrole brut de viscosité élevée, avec un point d’écoulement à 36°C. Ni le pompage, ni la dispersion chimique ne sont envisageables. Le projet d’épandage aérien est abandonné.

Les missions aériennes se multiplient. Dès le 2 février; les plans Polmar-Terre sont déclenchés dans le Finistère et dans les Côtes d’Armor. Le plan Polmar –Mer est retardé pour cause de météo mais tous les dispositifs sont en alerte. Un réseau de PC-opérationnels relie les communes sinistrées. La Manche, pas encore touchée, se prépare.

Les premières mesures à terre

Les agents de la Direction Départementale de l’Equipement (DDE) posent des corps morts et des barrages flottants (5 km au total) appartenant aux centres Polmar de Brest et Saint Nazaire. Ils sont aidés par les plongeurs de la Marine nationale et des marins-pêcheurs locaux. L’entrée des ports, la rade de Brest, l’embouchure de cours d’eaux finistériens, la zone des abers, la réserve du marais de l’Ile Grande à Ploemeur-Bodou, les estuaires des Côtes d’Armor et les secteurs aquacoles sensibles sont ainsi protégés.

Avec les premiers échouements de pétrole sur le littoral du Nord Finistère le 3 février, le ramassage manuel et mécanique commence. La pelle, le seau, la fourche sont pratiquement les seules méthodes efficaces pour ramasser des boules de fioul prises dans le goémon. Les goémoniers habituellement utilisés pour nettoyer les plages, les engins des travaux publics servent à collecter ces déchets. De la Pointe Saint Mathieu à Cléder, les communes demandent des renforts. Des bénévoles rejoignent sapeurs-pompiers, militaires, personnel de la protection civile, employés de l’équipement.

La lutte à terre

Le 3 février, avec la venue d’une accalmie, le préfet maritime de l’Atlantique active le plan Polmar- Mer. Des bâtiments de la Marine nationale effectuent des essais de chalutage le 6 février en baie de Brest et de Douarnenez. Ils sont rapidement abandonnés car les boulettes de polluants ressortent par les mailles. Le déploiement de barges de récupération, de récupérateurs Sirene 20 et de réservoirs gonflables Pollutank mis en œuvre par deux patrouilleurs de la Marine nationale échoue. Le plan Polmar-Mer prendra fin le 9 février.
 Le 10 février, on comptabilise plus de 800 personnes en action. La commune de Pospoder qui a été la première touchée fait appel à une entreprise privée pour nettoyer le pétrole frais souillant les murs, les quais et les enrochements.

Une logistique anti-pollution se développe également dans le Sud Finistère puis dans le département de la Manche. Le matériel de la DDE et les stocks Polmar sont aussi mobilisés. Le centre Polmar de Brest fournit le 6 février une ratisseuse de plage ROLBA pour collecter rapidement et sélectivement le pétrole très visqueux déposé sur les plages d’Audierne et de Crozon. Mais ces essais d’utilisation s’avèrent moins efficaces que le ramassage manuel. Plus tard, la centrale mobile de lavage des galets mise au point par l’Institut Français du Pétrole, le Laboratoire Central des Ponts et Chaussées et le Cedre est utilisée avec succès sur les galets de la Baie d’Audierne. Cette méthode innovante permet de conserver le cordon de galets protégeant le site.
 Dans les Côtes d’Armor, la pollution est moins massive mais s’étend progressivement d’Est en Ouest entre le 11 et le 25 février. Le nettoyage est effectué par les communes et à leur initiative. Pleubian, la commune la plus touchée, demande le renfort de volontaires et bénévoles.

Le nettoyage du pétrole

Engins lourds, tracteurs, pelleteuses, camions transportent les matériaux récupérés jusqu’aux sites de stockages provisoires ou intermédiaires. Dans les recoins inaccessibles, ce sont les hélicoptères de l’aéronavale ou bien des embarcations à fond plat qui se chargent de récupérer les sacs de déchets ramassés manuellement.
 
 Goémon, sable, galets et débris sont dépollués sur place, transportés à destination de la station de déballastage de Brest ou amenés jusqu’à d’autres centres de traitement. Dans le Nord Finistère, 2100 mètres cubes de déchets très faiblement mazoutés (moins de 5% de pétrole) sont enfouis dans la décharge du Spernot à Brest. Tous les déchets de la côte sud du Finistère (4375 mètres cubes) ainsi que 300 mètres cubes de déchets provenant de la reprise partielle du nettoyage de la côte Nord sont rassemblés sur le terre-plein du Port de Commerce de Brest. Commencées le 17 février, les opérations de traitement à la chaux s’achèvent le 21 avril.
 
Au total, près de 10 000 tonnes de déchets seront ramassées sur les côtes bretonnes, et 2000 à 3000 tonnes sur le littoral normand.

Le traitement des déchets

Sur chaque site pollué la nature du littoral et des déchets détermine le protocole de traitement à suivre…
 Des essais de traitement sur les algues agglutinées de mazout sont effectués sur le port de Brest. Les spécialistes du Cedre, de l’Institut Français du Pétrole et du Centre d’Etude et de Valorisation des Algues choisissent cette option pour les 200 tonnes récoltées près de Melon-Porspoder. L’entreprise retenue pour effectuer ces travaux est aidée par les techniciens de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Brest. Les pelotes gluantes sont broyées puis malaxées avec de la « granula ». Cette chaux vive très calcique fixe les hydrocarbures. Ce traitement avait déjà été éprouvé lors de l’accident l’AMOCO CADIZ. Il consiste à étaler le goémon mazouté par couches d’une vingtaine de centimètres, à le malaxer par passages successifs pour rendre le tout homogène, à disperser la chaux vive à l’aide d’une épandeuse puis à malaxer à nouveau pour enfin compacter le tout au rouleau (Isopracteur). Un laboratoire est chargé de contrôler la qualité de la chaux, de mesurer la teneur en eau des déchets. Le produit résultant est recyclable en matériau de remblai ou en engrais pour le jardin.

Pour le Sud-Finistère, ce sont des plaques compactes de mazout qui ont été stockées. L’option retenue consiste à les incinérer.

Le nettoyage des galets

Dans la Baie d’Audierne, le cordon de galets qui protège les étangs littoraux est infiltré de pétrole. Un volume estimé à 1200 mètres cubes doit être dépollué et remis en place avant les grandes marées car il doit reprendre son rôle de protection naturelle des dunes. Le Cedre et l’IFP proposent une technique de nettoyage innovante : une centrale mobile de lavage des galets.
 L’ensemble des opérations de nettoyage s’achève fin février. Le nettoyage des galets se poursuit jusqu’au mois de mars.

Le stockage intermédiaire

Dans le Finistère, le Cedre conseille de regrouper les déchets en un ou deux points par secteur pour faciliter l’évacuation. Des engins agricoles les déposent directement sur des revêtements de parking, sur des bâches plastiques (Baie des Trépassés), dans des fosses spécialement creusées à cet effet (Kersiguenou en Crozon), ou dans des bennes stationnant sur les parkings (Sainte Anne La Palud).

 Des déchets hélitreuillés

Le 16 février, des Super Frelons de la Marine nationale interviennent pour évacuer les sacs de déchets issus du nettoyage de plages à accès difficile. Il s’agit par exemple des plages de Penhat, et Lanroz (Camaret) et de Trez Bihan (Telgruc). Ces sites bordés par de hautes falaises, ou limités par des éperons rocheux interdisent l’accès par la côte, même à marée basse. La marée allant croissant, le mauvais temps d’Ouest sévissant, il devient urgent d’intervenir. Il faut éviter que le polluant ramassé à la main ne soit repris par la mer.
 
 Le site de Trez Bihan représente notamment une source potentielle de pollution pour les autres sites environnants non pollués ou déjà nettoyés. Étant donné le coût important (50 000 FF/h), des discussions s’engagent entre les assureurs et les autorités responsables des opérations de lutte. Plus de 900 sacs de 40 kilos chacun (35 rotations en 5 heures) seront finalement déposés au sommet des falaises. Un peu plus de 30 m³ sont évacués vers des centres de traitement.

Des déchets évacués par la mer

Dans le cas particulier du Perzic, l’évacuation de 5m³ de déchets se fait par la mer. Deux embarcations sont acheminées par route jusqu’à la plage de Kerloc’h. Elles effectuent pendant 6 heures des navettes pour charger et décharger les sacs de déchets. Même si ces barges de rivières ne sont pas réellement adaptées, la totalité des sacs est récupérée.

Dernière modification le 01/07/2003
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