Amazzone : l'indemnisation
Le cadre
La mise en œuvre du plan Polmar autorise une couverture financière des frais engagés par les collectivités territoriales et des dépenses exceptionnelles des services de l’Etat à travers un fonds spécifique, le fonds Polmar. Dès le 8 février, l’Etat débloque deux millions de francs pour le Finistère. Les dépenses engagées sont importantes, en particulier les opérations de nettoyage des côtes et des ports ainsi que la réfection des accès routiers endommagés. Il faut verser des aides aux pêcheurs, aquaculteurs, goémoniers, professionnels du tourisme en attendant l’évaluation et l’indemnisation de leurs pertes économiques.
Conformément aux conventions en vigueur, c’est le propriétaire qui indemnisera l’ensemble des victimes, par le biais de la franchise de sa police d’assurance, puis son assureur mutuel, le Standard Protection and Indemnity Club (standard P&I), jusqu’à un plafond fixé par la jauge du navire. Pour garantir le paiement, le Club choisit de déposer la somme au tribunal de grande instance de Brest. C’est le « fonds de limitation », une enveloppe de 13,86 millions de francs que les professionnels et les collectivités devront se partager. Le FIPOL, organisme intergouvernemental créée en 1978 dans le cadre de l’organisation Maritime Internationale, complètera jusqu’à un deuxième plafond fixé par la jauge du navire.
Les demandes d'indemnisation
Il faudra près de deux ans pour que l’Etat Français soumette sa demande d’indemnisation. Les estimations des coûts de nettoyage, des pertes d’aménités, des pertes sur le tourisme, des dommages sur les ressources naturelles, sont longues et difficiles. Le montant global de la réclamation du gouvernement, d’abord estimé à 22,255 millions de francs est ramené à 20,960 millions de francs. Le département des Côtes d’Armor, vingt cinq de ses communes, le département du Calvados et quinze municipalités présentent des réclamations totalisant 1,276 millions de francs. Cinq pêcheurs français et un organisme privé chargé de nettoyer les oiseaux mazoutés déposent des dossiers d’indemnisation pour 300 000 francs. Au total, cela représente plus de 22,5 millions de francs. Les autorités de Jersey et Guernesey y ajoutent pour leur compte 24 776 £ de frais de nettoyage.
Le traitement amiable
Chacune des demandes d’indemnisation est étudiée par les experts du Standard Club et du FIPOL. L’assureur puis le fond d’indemnisation, acquittent les montants après déduction des éléments de réclamation jugés excessifs, en incluant les intérêts s’il y a lieu.
Entre 1988 et 1992, les départements et communes touchent 1,09 millions de francs intérêts compris, les pêcheurs et l’association de nettoyage des oiseaux 197 000 francs. Le gouvernement français voit sa demande acceptée à hauteur de 17,15 millions de francs (83% du total réclamé) et touche en novembre 1992, avec les intérêts de retard, une somme de 18,755 millions de francs.
La procédure pénale
Comme la pollution résulte d’une faute manifeste, le FIPOL et l’Etat français décident de poursuivre les parties potentiellement fautives. Des experts sont nommés par le tribunal de Commerce d’Anvers, l’Etat français, le FIPOL et les communes. Ils inspectent le navire arrivé à Anvers. Les documents de bord et l’état du navire sont vérifiés. Des indices de négligence sont retenus contre l’armateur et le propriétaire.
Une action en justice est intentée par l’administrateur du FIPOL et le Gouvernement français. Le tribunal de Cherbourg évalue les responsabilités exactes de chacun. Il est établi que le sinistre résulte de la faute personnelle du propriétaire de l’Amazzone. L’armateur est reconnu coupable d’avoir insuffisamment entretenu le système de couvercles Butterworth à l’origine du sinistre.
L’Etat français réclame 20 960 056 francs plus les intérêts correspondants, car au moment où l’action en justice est engagée, sur indemnisation par le FIPOL n’est pas encore réglée. Il se désistera en novembre 1991 une fois l'indemnisation par le FIPOL versé. Le FIPOL poursuit l'action et souhaite être dédommagé des montants qu’il a ou doit encore verser.
L’action en justice prendra définitivement fin en juin 1992. A la suite de trois mois de négociations, un accord de règlement extra judiciaire est signé. Le FIPOL récupéra 4,5 millions de francs du propriétaire, de l'affréteur et de leurs assureurs.