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Preuve et jurisprudence

L'infraction constatée, il faut poursuivre le contrevenant et prouver sa culpabilité.

En droit pénal français, le principe qui s’applique est la liberté de la preuve (Article 427 du Code de procédure Pénale). Il appartient aux juges d’apprécier, après débat contradictoire, les éléments fournis et de décider d’après leur intime conviction dûment motivée. Il appartient donc à l’agent habilité de l’autorité responsable de la surveillance des pollutions maritimes de fournir des éléments de nature à emporter cette intime conviction. De son côté, il appartient au prévenu qui conteste l'accusation dont il est l'objet de convaincre éventuellement de la non validité de ces éléments.
 
Au niveau européen, les preuves admises par les tribunaux diffèrent d'un pays à l'autre. L'accord de Bonn pour la protection de la mer du Nord a cependant permis une harmonisation et la reconnaissance commune des six modes de preuves suivants :
- la déclaration écrite (procès verbal),
- les photographies,
- le radar à balayage latéral,
- les échantillons d'hydrocarbures (prélevés directement dans le sillage du navire en cause et à bord lors d’une inspection),
- les analyses par chromatographie en phase gazeuse et spectrométrie de masse,
- le compte rendu d'inspection au port.
 
D'autres modes de preuves sont admis ou pas selon les pays. Ainsi l'enregistrement radio et l'enregistrement de l'appareil de positionnement sont reconnus en France. En pratique, la validité d'un élément de preuve est établie par la jurisprudence.
 
Ainsi, l ’article L 218-28 du Code de l’environnement dispose que les constatations des agents habilités, consignées dans des procès verbaux, « font foi jusqu’à preuve du contraire ». Plusieurs contrevenants supposés ont tenté de contester la valeur probante de ces procès-verbaux, toujours étayés de photographies. Trois affaires de rejet illégal d’hydrocarbures relatives aux navires Voltaire, Dobrudja et Nova Hollandia ont ainsi été portées devant la Cour d’appel de Rennes en 2005. La Cour s’est livrée à une analyse très poussée des éléments de preuves rapportées. Elle a consacré le témoignage du pilote corroboré par un élément de preuve matérielle (photographie, prélèvement…) comme suffisant. Les photographies servent surtout à démontrer la source de la pollution.
 
Dans le cas du Voltaire, les juges ont précisé que les photographies « anéantissent l’hypothèse selon laquelle le navire aurait suivi le sillage d’un autre navire ou l’aurait croisé » puisqu’un bateau qui passe sur un nappe l’écarte et laisse une trace propre. La qualité des photos ne leur permet pas toujours de se substituer à l’œil de l’observateur aérien, qui peut mieux évaluer les nappes et les décrire de manière cohérente. C’est pourquoi le témoignage de l’observateur repris dans un procès verbal constitue la pièce maîtresse de l’accusation. Toute incertitude de localisation géographique des faits rapportés dans ce procès verbal, de nature à introduire une confusion avec un autre navire, peut légitimement profiter à l’accusé.

Les juges de Rennes ont donc réaffirmé avec force la jurisprudence « Traquair » dans les 3 cas en considérant que la preuve de l’élément matériel du rejet d’hydrocarbures se trouve rapportée par les constatations visuelles de l’agent verbalisateur et les clichés photographiques qui les corroborent. Ils ont par ailleurs complété l’analyse par la preuve de l’intentionnalité considérant qu’un arrêt de la pollution après son signalement par l’observateur aérien caractérisait le rejet volontaire, constituant à leurs yeux « une atteinte grave à l’environnement maritime ». Il apparaît cependant que le fait de cesser de polluer dès qu’on en a connaissance ne prouve pas que la pollution ait été volontaire.
 
Les juges ont en outre considéré, dans l’affaire Voltaire, que « faute pour le commandant du navire de justifier d’une raison ou d’un incident qui aurait nécessité ou occasionné le rejet constaté dans le sillage du navire, celui-ci doit être présumé volontaire ». Ils ont par ailleurs infirmé la relaxe du Nova Hollandia en première instance, sur la base d’une négligence ayant conduit à un comportement téméraire, se fondant sur le fait que le capitaine connaissait le mauvais état de la cuve à l’origine de la fuite et que la pollution était prévisible.
 
Par ces 3 arrêts de 2005, la cour d’appel de Rennes met en avant une interprétation claire du caractère répressif des nouveaux textes français en considérant que « la répétition de ces actes de pollution sur les routes maritimes justifie qu’il soit fait une application ferme de la loi ».

Dernière modification le 01/02/2007
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